Humm, ça sent tellement bon ! Le jour de notre visite, le soleil éclaire les marmites de framboises bouillonnantes et les plaques de pâte de coing et d’abricot en train de sécher. On pourrait décider de tout quitter et de passer le restant de nos jours chez Frambiola, petit atelier d’artisanat culinaire situé à Doussard, au bord du Lac d’Annecy (autre détail sympathique !). Ses deux associés, Dominique et Raphaël, produisent des pâtes de fruits en quantité raisonnée à partir de fruits bios et régionaux. L’été, ils vont à la rencontre des producteurs pour récupérer des fruits fraîchement cueillis, puis les transforment en pulpes. Le reste de l’année, ils changent les pulpes en délicieuses pâtes de fruits…
L’été, les fruits
Dominique est issue d’une famille paysanne. Elle se rappelle sa mère qui jardinait et cuisinait, tandis qu’elle-même cueillait et humait les senteurs de la terre et des marmites. Devenue un temps restauratrice, elle n’a jamais coupé ce lien à la terre. Se rendre directement chez le producteur est une évidence pour elle comme pour Raphaël. C’est ainsi qu’ils prennent chaque été les mêmes routes pour remplir leurs paniers.
Dominique et Raphaël travaillent avec des producteurs bios de la région Rhône-Alpes, les mêmes d’année en année. Frambiola indique ses besoins au printemps, le producteur fixe son tarif. Chacun son métier, d’autant que les mauvaises années se succèdent pour les arboriculteurs et qu’il est primordial de les soutenir. Dans la Drôme, les abricots se raréfient dramatiquement…
Une exception à la culture : les myrtilles d’Ardèche, qui sont sauvages. Elles poussent dans des zones entretenues par les propriétaires récoltants.
Seul fruit d’automne, le coing provient en partie d’une petite productrice d’Annecy. Mais la majeure partie est déposée par un producteur des Hautes-Alpes qui vient chaque année dans la région.
Dès leur retour à l’atelier, Dominique et Raphaël mixent les fruits avec 10 % de sucre, puis congèlent les pulpes ainsi obtenues. Ils confectionnent également des confitures (disponibles à Satoriz Annecy).
Toute l’année, les pâtes de fruits
Les pâtes de fruits de Frambiola contiennent 40 % de fruits, dont… 100 % du fruit mentionné sur l’étiquette. Notons que c’est loin d’être le cas de toutes les pâtes de fruits du commerce !
Pour les préparer, c’est comme à la maison. Dominique cuit la pulpe à la casserole avec du sucre pendant 10 minutes. Elle pourrait utiliser un thermomètre, mais l’allure des bulles à la surface du mélange lui indique que la bonne température est atteinte.
Il est temps d’ajouter la pectine (pour la prise) et un peu de sirop de blé (pour le moelleux et la conservation). La préparation est ensuite versée dans un cadre carré, puis séchée pendant 4 heures.
Raphaël récupère les carrés de pâte de fruits et les découpe en plaques. Moins de découpes, c’est moins de temps et donc un prix plus avantageux pour le client ! Raphaël passe les plaques dans du sucre. Cette opération va permettre un séchage optimal de la pâte de fruits. Celui-ci dure trois semaines.
Lorsqu’elles sont prêtes, reste à les emballer. À la main là encore. Chaque plaque de pâte de fruits est posée sur un carton, glissée dans un fin sachet plastique puis étiquetée. Quand, à partir d’octobre, Frambiola passe à la production des papillotes pour les fêtes, c’est 30 000 petits cubes qui sont emballés un à un et 20 000 de plus empilés dans des sachets ! Un véritable atelier du Père Noël…
Dominique et Raphaël produisent 8 parfums, dont 7 sont disponibles à Satoriz : mûre, myrtille sauvage, cassis, framboise, abricot, coing et fraise.
Ringardes, les pâtes de fruits ?
« Nous n’avons que des clients qui n’aiment pas les pâtes de fruits ! », s’amuse Dominique. Mais alors… ? Frambiola les leur a fait aimer, tout simplement !
Vintage, les pâtes de fruits nous rappellent des souvenirs d’enfance et sont un très bon compagnon de l’effort. Elles sont plus qualitatives et bien moins chères que les bonbons industriels, 100 % chimie ! Même si mieux vaut, pour la santé, croquer dans un fruit, il ne s’agit pas de bouder le plaisir qu’apporte un morceau de pâte de framboise moelleuse. Ni certaines associations insolites suggérées par Dominique : comté et pâte de coing, morbier et pâte de myrtille…
Atelier vertueux
Vous ne trouverez pas les pâtes de fruits Frambiola dans tous les magasins Satoriz. Pourquoi ? Tout simplement parce que Frambiola veut conserver sa taille artisanale et ne peut pas produire davantage ! Dominique et Raphaël sont attachés à leur lieu, une simple pièce accolée à la Tartine, une boulangerie bio, et à leur statut d’artisans – et non de managers. Qualité de vie et qualité de la production ne sont pas incompatibles.
La Tartine est la cousine de Frambiola : les deux structures sont liées par leur histoire. Les fondateurs de Frambiola, couple de fervents militants du bio, souhaitaient initialement intégrer La Tartine. Aucune place d’associé n’étant disponible, ils ont créé leur propre atelier en 1999. Quelques années plus tard, le fondateur de Frambiola a pu rejoindre La Tartine, laissant sa place à Dominique. Celle-ci a travaillé seule quelques années – avec quelques coups de main occasionnels – avant d’être rejointe par Raphaël.
Dominique et Raphaël souhaitent avoir l’empreinte la plus restreinte possible :
– Frambiola livre depuis toujours Satoriz, dont la centrale est située à trente minutes de route. L’atelier approvisionne également des magasins locaux qui partagent leurs valeurs.
– Proposer les pâtes de fruits en plaques permet d’éviter le suremballage et de diminuer le prix.
– Les feuilles de papier cuisson sur lesquelles sèchent les pâtes de fruits sont réutilisées.
– Les sacs de sucre servent de sac-poubelle lors du « World clean up day », opération de nettoyage de la commune mise en place par des associations à l’initiative de Dominique.
– Les déchets de fruits sont certifiés afin d’être donnés aux poules de l’élevage bio voisin.
La délicieuse odeur des framboises en train de compoter est-elle arrivée jusqu’à vos narines ? Les nôtres s’en souviennent encore. Plaisir des sens qui sera réactivé à chaque fois que nous mordrons dans une pâte de fruits moelleuse, savoureuse et respectueuse des humains qui l’ont confectionnée.