La noix secrète

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?????????????????Il est des fruits sans mystère, qui sont ce qu’ils sont après avoir été bourgeon puis fleur, la filière classique en somme ! Souvent brillamment parcourue d’ailleurs, admirés quand fleurs, puis généreusement butinés et enfin dégustés comme un don divin. Point n’est besoin de les nommer une fois encore ! Aujourd’hui, nous nous attarderons sur un atypique à propos duquel tout un chacun sait ce qu’il faut savoir, à moins que le poète… amateur puisse ouvrir un pan encore inexploré ? Restons modeste et voyons avec Florian Adenot, un de nos nuciculteurs, ce que noix nous cache !

chaton-noixLes plus attentifs d’entre vous connaissent le projet de Florian, les autres n’auront qu’à retourner au Sat’Info n° 106. De toute façon immanquable car ses noix sont maintenant partout : dans vos salades, vos assaisonnements, sur vos tartines et peut-être même dans votre sac-à-dos. Ce fruit est riche : de saveur, d’énergie et de bienfaits.
Fruit ? Voici que se présente le premier malentendu : le fruit du noyer ne se mange pas, ceux qui ont essayé l’ont immédiatement expulsé. La pulpe de cette bogue (on devrait dire drupe) ferme et verte, issue d’un long châton brun que les abeilles négligent au printemps, se déssèche à l’automne et ne peut nous donner qu’une teinture (le brou). Ou parfumer après macération un excellent apéritif maison.

Il faudra qu’elle s’efface au mois d’octobre pour que l’on découvre enfin la splendeur d’un… noyau. Noix/Noyau, vous suivez. Car ce sont bien des noyaux que le geste auguste du gauleur va faire pleuvoir dans les prairies l’automne. Mieux, des joyaux par leur éclat doré dans la lumière rasante, la perfection des motifs de leur coque ligneuse, le son qu’ils rendent en s’entrechoquant dans le panier.

coque-noyerEt nous voici enfin parvenu au coeur de notre affaire ! C’est sous l’impact sec et précis de la masselote du grumailleur (ou du mondeur) que se dévoile notre précieuse et si particulière amande. Est-ce son aspect de petit cerveau végétal qui lui valu ce beau nom de cerneau ? Ou son confinement, cerné sous la coque, comme une perle dans une huître ? Le mystère d’une découverte demeure à chaque coup de marteau !

Florian a bien sur dû abandonner ces gestes ancestraux pour une efficace et productive casseuse, suffisamment délicate pour préserver la belle allure entière du cerneau. Le travail accompli, il s’applique à ramasser proprement tout ce beau bois de coques, avec l’idée d’en faire le combustible futur d’un séchoir qu’il lui reste à imaginer. Sécher des noix fraîches par la combustion de leur propre enveloppe, voilà une belle démarche globale qui deviendra réalité prochainement.

noix-noyerDe l’étrangeté, on en trouve aussi dans l’arbre, le noyer. Il ne fait rien comme les autres : dernier vêtu au printemps, il se retrouve le premier dénudé à l’automne, une fois sa tâche accomplie. Peut-être lui faut-il se débarrasser rapidement de cette ombre qui traîne une très mauvaise réputation : les enfants d’hier ne s’y attardaient jamais de peur d’y attraper la mort, anecdotes véridiques à l’appui. Pas de quoi pourtant décourager les maraudeurs qui en ont fait une de leur cible préférée…
Et son écorce grise ne laisse en rien présager qu’elle cache aussi un des plus beaux bois d’ébénisterie .Qui a osé inventer cette expression à la noix d’« à la noix » !

confiture

 

Maintenant rassasiés de mots, nous pouvons nous attabler enfin, et déguster cette confiture de noix, recette secrète de Florian. Puis découvrir celles de poire, poire/verveine et poire/cannelle tout aussi fameuses ! Ne vous laissez pas surprendre : c’est maintenant et tant qu’il en reste…

Alain Poulet