C’est une grande bâtisse posée là, aux confins du village de Planaise. Nous sommes dans la Combe de Savoie, entre Montmélian et Aiton. Le lieu est chargé d’une histoire, celle de l’accueil de personnes un peu, beaucoup, fragilisées par la vie… Ici, longtemps, une communauté de religieuses a offert le gîte et le couvert à des « filles-mères » reléguées en marge de la société. En 1997, lorsque l’heure de la retraite a sonné, les sœurs ont vendu le bâtiment à l’association Habitat et Humanisme. Les acteurs associatifs locaux ont alors mis en place un double projet : un centre d’hébergement lié à un chantier d’insertion en maraîchage bio, Terre Solidaire. C’était l’époque des premiers jardins de Cocagne, réseau de 120 structures dont Terre Solidaire fait partie. L’idée était toute neuve à l’époque : offrir un emploi à des personnes désocialisées et en difficulté afin de leur permettre de retrouver une dignité par un travail rémunéré. Les légumes bio cultivés sur place sont répartis dans des paniers qui partent chaque semaine vers les adhérents de l’association, désireux tout autant de manger bio, local et de saison, que de participer à un acte citoyen. Le premier panier est livré en mai 1999. En ce joli mois de mai 2019, Terre Solidaire fête donc ses vingt ans tout juste !
Faute de subvention, le centre d’hébergement est fermé en 2017. Depuis, Terre Solidaire est resté un chantier d’insertion par l’activité économique. Les maraîchers de Terre Solidaire sont performants : ils réussissent à sortir 400 paniers hebdomadaires. Une trentaine de salariés travaille chaque jour et chacun repart au bout de quelques mois avec un projet d’emploi qui tient la route.
L’association est subventionnée à hauteur de 70% par les collectivités – pour le reste, il s’agit de vendre des légumes ! Or la recette générée par les paniers d’adhérents ne suffit plus*. C’est la raison pour laquelle Terre Solidaire s’est tournée vers Satoriz : une partie de la production est vendue dans notre magasin le plus proche, celui d’Albertville.
L’association et le magasin travaillent en collaboration avec Le Jardin des Solstices. Ancien intermittent du spectacle, Thomas s’est formé au maraîchage bio puis il s’est installé en Savoie avec sa femme Audrey. Ils sont depuis sept ans à la tête d’une « exploitation » qui a grossi petit à petit pour suivre la demande. Désormais, entre 3 et 10 salariés travaillent avec eux sur 8 hectares sur la commune de St Vital.
Nos clients d’Albertville connaissent et apprécient les légumes du Jardin des Solstices depuis le début de l’aventure. Tous les grands classiques sont présents bien sûr, mais aussi des espèces alternatives qui donnent de la couleur au banc de fruits et légumes, comme le radis red meat, la betterave orange ou chioggia, la carotte violette, la patate nouvelle rouge, les radis multicolores, les topinambours… Thomas est intarissable sur ce métier de maraîcher bio, choisi pour redonner du sens à son quotidien. Il nous raconte le travail de sa terre, enrichie grâce à la culture d’engrais verts comme le pois et le triticale, son projet de haie vive qui bordera bientôt le terrain, l’utilisation de film de paillage compostable pour préserver les cultures des adventices, stimuler l’activité des micro-organismes du sol et économiser l’eau…
Lorsque Satoriz passe commande, Thomas et Terre Solidaire s’entendent pour répartir les volumes entre les disponibilités de chacun, afin d’arranger tout le monde. Plus qu’un travail de partenariat, ce sont des liens d’entraide que les maraîchers ont tissés. Le magasin s’engage lui sur les tarifs et les volumes négociés, et, parfois contribue à un petit coup pouce sur un financement d’infrastructure comme récemment pour boucler l’achat d’une serre. Le cercle est vertueux et Véronique Zanardo, directrice de Terre Solidaire, s’en réjouit : « On n’arriverait pas à fonctionner si l’objectif premier était l’argent. Ici, et pour tout le monde, il s’agit clairement de l’humain ». Et puis au passage, constate-t-elle après cinq ans de collaboration, travailler avec un magasin a permis aux salariés du chantier d’insertion de se professionnaliser pour répondre à des commandes bien précises : récolter et préparer les légumes en fonction des exigences qualitatives du magasin, peser au plus juste, établir les étiquettes et les bons de livraisons, respecter les délais fixés – autant de compétences qu’ils pourront offrir plus tard à un autre employeur.
CC