Autrice prolifique de livres de cuisine et de jardin bio publiés aux éditions Terre vivante, Marie Chioca est une experte de la transformation de légumes bio en recettes plus alléchantes les unes que les autres. Dans cette interview, elle nous donne tous ses secrets pour cuisiner ceux du jardin d’été !
Bonjour Marie ! Merci de nous accueillir chez toi pour parler de cuisine d’été. Nous sommes en Isère, mais tu es d’origine niçoise. As-tu des souvenirs d’enfance à nous partager ?
Le gratin d’aubergine de mon papy Marcel ! Il me gardait tous les mercredis et c’était sa « recette signature ». Bon, c’est 4 000 calories la part : il faisait frire des aubergines puis il les faisait confire au four dans un plat en terre avec du parmesan et une sauce tomate maison. Le parfum de ce gratin était incroyable, ça fondait dans la bouche !
Tu cultives les légumes d’été dans ton potager depuis plusieurs années. Est-ce qu’ils sont faciles à faire pousser ?
De plus en plus ! Il y a vingt ans, je n’arrivais pas du tout à cultiver des aubergines en Isère, mais aujourd’hui elles poussent très bien… Les légumes dits « à ratatouille » sont les piliers de mon autonomie en légumes, car ils sont très productifs. Ils sont aussi très gourmands en amendements, donc je n’hésite pas à leur donner beaucoup de fumier. Les soins donnés au sol sont primordiaux pour bien les réussir.
Choisis-tu de les semer ou de les planter ?
En général, j’achète des plants car ma maison n’est pas assez lumineuse ni assez chaude pour les faire moi-même. Je les installe fin avril, début mai, sur une parcelle exposée plein sud. Ils donnent jusqu’à fin octobre. Je dois malheureusement les arracher avant qu’ils n’aient fini de mûrir, sinon je n’ai pas le temps d’installer les productions hivernales comme la mâche ou l’épinard.
Commençons par la courgette ! As-tu une variété préférée ?
De manière générale, j’installe beaucoup trop de plants de courgette dans mon jardin car je raffole de leur diversité ! Il y en a une qui est particulièrement moche – on dirait qu’elle a la gale ! – mais qui possède un goût de folie, c’est la Friulana. Les courgettes, pour qu’elles soient bonnes, il faut qu’elles soient petites et fraîchement récoltées. Trop grosses ou pas assez fraîches, elles deviennent un peu amères.
Quelle est ta recette favorite avec les courgettes ?
Celle que je fais le plus souvent, c’est une fondue de courgette qui peut aussi servir de base pour d’autres recettes. Dans une cocotte très large, je fais revenir des oignons dans de l’huile d’olive, puis j’ajoute des courgettes en tranches et de l’ail et je laisse confire. Je termine avec une petite tombée de parmesan. C’est une très bonne sauce pour des pâtes, une pizza verte, une tourte ou un cake salé.
Et le haricot vert ?
Je trouve que c’est en salade qu’il est le meilleur. J’aime bien l’assortir avec des pommes de terre du jardin, des œufs, de la cébette rouge et du persil haché très fin. Je prépare toujours une sauce un peu épaisse, avec cette astuce que personne ne connaît : préparer une vinaigrette puis l’émulsionner au mixeur plongeant pour la rendre épaisse et onctueuse.
Une idée pour changer de la salade de haricots ?
Je fais bouillir les haricots verts à l’eau salée, puis revenir dans du beurre avec un peu d’ail. Un régal !
Passons au concombre : doit-on forcément le peler et le faire dégorger ?
Je fais les deux, car cela change tout au niveau de la digestion. Une fois pelé, je coupe le concombre en rondelles. Je les mets dans une passoire avec du gros sel. Une trentaine de minutes plus tard, on peut les rincer et les déguster. Ce que je préfère, ce sont les salades avec une sauce crémeuse à base de yaourt à la grecque, de skyr ou de crème fraîche. Je mélange ça avec du vinaigre, de l’huile d’olive et du poivre 5 baies. Un petit oignon haché ne gâte rien !
Faut-il aussi peler et épépiner les tomates ?
Peler, oui. C’est meilleur au goût et beaucoup plus digeste. Mais je ne les épépine pas car je raffole du goût et de la texture de la chair qui contient les pépins !
Une recette préférée ?
La « recette » que je réalise le plus souvent en été consiste à éplucher une tomate au soleil et à la savourer telle quelle, encore toute chaude, avec le bon jus qui coule jusque sous le menton !
Tu préfères les grosses tomates ou les tomates cerises ?
Je trouve que les tomates cerises ont beaucoup plus de goût. Elles sont naturellement plus sucrées : quand on fait une sauce avec, elle est moins aqueuse et plus riche en goût. Celles-ci, même pas besoin de les peler ! J’adore les utiliser pour préparer un dip façon houmous. Il est délicieux pour l’apéro, dans les boîtes-repas, en pique-nique, en « purée » pour accompagner une viande ou des œufs mollets… et même au petit-déjeuner !
Quel est ton poivron favori ?
Le rouge, parce qu’il est beaucoup plus sucré et parfumé. Dans mon jardin, j’installe toujours la variété ancienne Corne de taureau, qui résiste bien au climat montagnard et donne de longs poivrons qui mûrissent d’août à octobre.
Quels sont tes conseils pour le cuisiner ?
Quand on a le temps, l’idéal c’est de le faire griller entier au four puis de le peler. Sa peau est assez indigeste, comme celle de la tomate ou du concombre. J’aime en faire de grands plats, comme une piperade, mais aussi ajouter du poivron par petite touche dans des plats ou des salades.
Passons à l’aubergine ! Conseilles-tu de la peler ?
Je ne la pèle pas et je ne la fais pas dégorger. Les variétés d’avant pouvaient être assez amères, mais ce n’est pas le cas des variétés actuelles. Je les récolte suffisamment petites pour qu’elles n’aient pas de grosses graines. J’aime les faire confire à la poêle. Sinon, je les coupe en tranches et je les enfourne après les avoir badigeonnées d’huile d’olive. Cela donne des petites tranches bien dorées que l’on peut glisser dans des salades composées avec des tomates cerises, des copeaux de parmesan…
Comment prépares-tu la ratatouille ?
Cela dépend vraiment du temps dont je dispose. La meilleure recette, c’est celle qui consiste à faire revenir séparément chaque légume. Mais dans mon dernier livre, je donne une version différente qui consiste à cuire en même temps « un légume de chaque ». Le piège, c’est de mettre trop de légumes à la fois, ce qui donne une ratatouille trop aqueuse. Mais avec juste un de chaque, ça fonctionne !
Avec quoi la sers-tu ?
Je suis fana du mariage de la ratatouille avec du riz. C’est aussi une base merveilleuse pour d’autres recettes, comme une tourte ou un cake salé. Et dans le meilleur des mondes possibles, je crois que tous mes repas pourraient se constituer d’une tranche de pain au levain tartinée de ratatouille maison, avec une goutte de sauce pimentée !
Aimes-tu aussi préparer du tian ?
Oui, car la recette est super pratique si l’on a prévu d’allumer le four. Mais je ne prépare pas le tian en rangeant les légumes rondelle après rondelle : c’est trop long ! J’obtiens un résultat tout aussi satisfaisant en mélangeant les légumes découpés sur une grande lèchefrite. Je trouve que chaque légume est mieux doré ainsi. Avant d’enfourner, j’ajoute toujours huile d’olive, origan, ail et sarriette.
Quels sont tes ingrédients favoris pour accompagner les légumes d’été ?
Je ne suis pas adepte des mélanges type « Herbes de Provence », car je trouve dommage que toutes les recettes finissent par avoir le même goût. Je préfère utiliser chaque parfum indépendamment : un plat parfumé à l’origan, un autre à la sarriette… J’aime aussi beaucoup le paprika fumé, qui s’harmonise particulièrement bien avec le poivron et la tomate. Pour accompagner les légumes du jardin, je cuisine des choses très simples : de bonnes pâtes d’épeautre, un plat de riz, une viande, un poisson grillé ou des œufs mollets de mes poulettes. Et j’ai du mal à me passer de parmesan ou de mozzarella !
Retrouvez aux éditions Terre vivante 80 recettes dans le dernier livre de Marie Chioca consacré aux légumes, saison après saison.