Écosystème + résilience = Écolience ! Pour qu’un écosystème s’adapte, il doit être cohérent : c’est sur ce constat que Frédéric et Marlène Grunblatt ont monté Écolience. À Genouillé, dans la Vienne (86), ils ont racheté une ferme et ses champs, les ont passés en bio et leur ont ajouté un immense bâtiment permettant de transformer de A à Z les produits de leurs champs et de ceux de 21 agriculteurs locaux. Un pari aussi dingue qu’évident.
Pourquoi c’est fou ?
On ne s’en rend pas compte, mais dans l’alimentaire presque tout implique de faire des détours. Même en bio, les mouvements de marchandises sont colossaux, à l’exemple de graines de sarrasin poussées en France, décortiquées en Lituanie, puis renvoyées en France. C’est aberrant mais c’est comme ça que ça marche : les machines adaptées se trouvent à des centaines de kilomètres, et c’est moins cher de faire des trajets que de s’approprier l’équipement et le savoir-faire. Le système est globalement construit comme cela et il est compliqué de vouloir en sortir. Pourtant, Frédéric et Marlène, fidèles à leurs convictions, l’ont fait. Avec Écolience, l’objectif est de conserver la valeur ajoutée sur le territoire en développant des outils de transformation locaux. Ce système d’économie circulaire 100 % bio est le plus respectueux possible de l’environnement. Il est aussi moins rentable : c’est un choix assumé.
« Tout faire ici, sans détour »
En convertissant la ferme en bio de 2018 à 2021, Frédéric et Marlène l’ont diversifiée : elle passe de 5 cultures à 20, avec beaucoup plus de légumineuses pour capter l’azote de l’air, des cultures associées, des chèvres poitevines qui produisent une partie du fumier, la plantation de haies et de 1500 arbres. La consommation d’eau a diminué de 40 %.
L’agriculture est le plus gros émetteur de carbone en France, avec 108 millions de tonnes de CO2 (soit 5 fois plus que le transport des marchandises). Le plus gros dégagement de carbone dans l’agriculture est lié à l’utilisation d’engrais azoté. En conventionnel, la ferme générait 427 tonnes de CO2 pour 260 hectares. En conversion, elle passe à 9 tonnes. En bio… elle séquestre au contraire 83 tonnes de carbone ! Son passage en bio représente l’équivalent de 290 allers-retours Paris New-York évités.
Écolience cultive toutes les céréales, légumineuses et oléagineux capables de pousser localement et de répondre à la demande des consommateurs de produits bio. Si une graine ne peut pas pousser ici, on ne la travaille pas. C’est ainsi que des graines de courge, de cameline ou encore de chia ont été mises en culture sur la ferme et les exploitations partenaires. Si Écolience s’autorise un périmètre de collecte de 100 km alentour, la distance moyenne pondérée est de 8 km en 2023 !
Le tracteur et sa benne déversent la récolte dont un échantillon est analysé. Des machines haute technologie s’occupent d’ébarber, brosser, épierrer, trier par taille, poids, couleur… Toutes ces étapes nécessitent un équipement complet et performant et un personnel qualifié.
Ensuite c’est simple : Écolience sait tout faire sur place. Décortiquer, stocker, conditionner, fabriquer de l’huile, de la farine, des pâtes, de la bière, des biscuits… L’objectif est de tirer le meilleur parti de toutes les récoltes. Alors que partout ailleurs, ces étapes sont éclatées entre de multiples ateliers, il suffit ici de quatre murs – aux fenêtres ouvertes sur l’extérieur, pour que les visiteurs apprécient le spectacle des ateliers. Le concept permet de limiter au maximum les déchets en les transformant en granulés de bois, en engrais bio ou en nourriture pour les chèvres et les porcs bio du coin.
L’exemple de la filière petit épeautre
Le rendement du petit épeautre après décorticage est de 59 % seulement (pour le blé, c’est 100 % car on ne le décortique pas !). Après transformation des graines décortiquées en farine, on perd encore 25 % de matière (le son).
Dans 1 kilo de farine de petit épeautre, il y a 6 minutes 45 de temps machine et
1 minute 18 de temps homme. Il faut 12 opérations pour passer du grain à la farine.
Dans 500 g de pâtes au petit épeautre, il y a 41 secondes de temps machine et de temps homme. Il faut 18 opérations pour aller des graines jusqu’aux pâtes.
L’huilerie
Tous les ateliers de transformation des graines sont low tech : les machines sont robustes, simples à utiliser et faciles à entretenir. Elles donnent un résultat hautement qualitatif.
Dans l’huilerie, les graines de cameline, de courge ou de colza descendent par gravité dans des vis sans fin avant d’arriver dans des presses artisanales. La pression exercée sur les graines est plutôt faible : on extrait ainsi moins d’huile qu’avec des procédés industriels, mais elle est beaucoup plus parfumée !
La meunerie
Pour obtenir les farines, les graines sont passées dans des moulins à meules de pierre dits Astrié. Historiquement, le moulin Astrié a été mis au point pour permettre aux paysans de valoriser leur blé à la ferme. La mouture Astrié est particulièrement respectueuse des qualités nutritionnelles des grains, car le moulin déroule ce dernier au lieu de l’écraser. Cela permet de faire un seul passage sous la pierre, contre 2 à 4 pour les meules de pierre traditionnelles et 7 à 8 pour les moulins à cylindres. La farine est beaucoup moins échauffée et conserve un maximum de qualités nutritionnelles, sans abîmer le germe, le gluten et l’amidon.
L’utilisation de différents tamis permet d’obtenir des farines plus ou moins complètes. Les volumes sont faibles, mais la farine a moins de risques de s’oxyder. D’autant moins que chez Écolience, on dénude les grains au tout dernier moment pour leur éviter de s’abîmer. Les farines sont ultra-fraîches, qualité premium !
Les pâtes
C’est encore une particularité exceptionnelle : Écolience fabrique sa propre semoule de blé dur. La plupart du temps, le blé dur est envoyé en Italie – au mieux – pour être changé en semoule, car l’exercice demande des machines spécifiques et du savoir-faire. Frédéric et Marlène se sont approprié les deux afin d’être en mesure de produire des pâtes en toute autonomie. Ils ont opté pour la meule de pierre pour une qualité optimale !
La semoule est mélangée à l’eau et malaxée pendant quelques minutes, puis le mélange est passé dans une presse qui expulse la pâte au travers de moules en bronze, qui lui donnent la forme voulue. Au passage, ces moules plus coûteux sont aussi les plus prisés, car ils confèrent aux pâtes la rugosité nécessaire pour bien attraper la sauce. Les pâtes sont ensuite séchées lentement à basse température. À la maison, leur temps de cuisson est ultracourt : 2 minutes seulement pour les fusilli sarrasin !
Le broyé du Poitou
Traditionnellement, ce gros sablé croustillant est cassé d’un coup de poing en son centre avant d’être dégusté. Cette recette terroir contient farine, beurre et sucre. Écolience l’a revisité en remplaçant 20 % de la farine de blé par de la farine de sarrasin, ce qui lui donne plus de légèreté. Ce Broyé est préparé avec du beurre bio AOP Charente Poitou issu d’une toute petite production. Un produit rare !
À chaque étape, Écolience a choisi l’excellence.
À nous, désormais, de l’honorer !