Le Fougère, Reblochon bio et fermier

Fromage savoyard par excellence, le reblochon présente une croûte couleur crème et une pâte souple. Si on l’associe sans peine aux tartiflettes et croziflettes hivernales, il est pourtant encore plus apprécié à partir du mois de mai, période durant laquelle les vaches profitent à nouveau des prés verts de la région, le « fin du fin » se savourant… en été, c’est-à-dire maintenant !

Le reblochon de Savoie est protégé par une AOP depuis 1958. L’AOP définit les races des vaches (Abondance, Tarine ou Montbéliarde) ainsi que leur alimentation : de l’herbe en moyenne montagne à la belle saison, du foin en hiver. La zone contrôlée se situe principalement en Haute-Savoie, à l’est d’Annecy. Plus une petite partie de la Savoie, le Val d’Arly. L’appellation décrit également toutes les étapes de la transformation du lait cru en un fromage tout en rondeur.

Le reblochon était autrefois un fromage un peu rebelle, celui du fermier qui pratiquait une traite incomplète afin de payer une moindre location à son propriétaire, celle-ci étant proportionnelle à la quantité de lait produite… Il “blochait”, ce qui signifie “pincer le pis de la vache”. Et lorsque le propriétaire était parti, le fermier “re-blochait”, tirant ce qu’il restait de lait, plus gras, pour en fabriquer immédiatement un excellent fromage qui n’était pas commercialisé : le Reblochon. Depuis, le Reblochon est devenu plus officiel, tout en préservant sa différence.

Au GAEC Fougère de Serraval (74), Bruno Gerfaux et son père, André, fabriquent du reblochon depuis quatre générations. Pas moins ! Dans la famille, les anciens fabriquaient dans la cuisine et séchaient les fromages dans la chambre à coucher… Ambiance. Au début des années 2000, les Gerfaux ont investi dans un laboratoire de production et une petite cave d’affinage attenante, deux infrastructures qui leur permettent de produire à la ferme tout en étant parfaitement dans les clous côté règles d’hygiène. Ils en profitent pour certifier officiellement leur production en bio.

Dans ce petit coin de paradis montagnard situé à 1100 m d’altitude, un troupeau de 25 vaches Abondance et Montbéliardes profite d’une alimentation de qualité tout au long de l’année. En été, elles paissent autour de la ferme pendant que Bruno produit le foin qui servira en hiver. Séché à l’abri du soleil dans une grange ventilée, il n’a rien perdu de son beau vert. La ration est complétée par le petit-lait issu de la fabrication du fromage, histoire de ne rien gâcher.

La méthode Gerfaux est totalement artisanale. Les ferments sont apportés dans le lait en début de traite. Puis juste à la fin de celle-ci, on ajoute la présure. Le lait est alors caillé, puis découpé en de multiples petits « grains » – qui font la taille d’un grain de maïs – à l’aide du tranche-caillé. Ce travail délicat s’effectue à la main. Après avoir été découpé, le caillé en grain “coiffe”, c’est-à-dire qu’il se couvre d’une fine pellicule qui lui permet de garder son humidité. C’est alors qu’il est versé dans des moules revêtus d’une toile, puis lestés d’un poids. On en tirera autant de reblochons le soir, après qu’on a égoutté le petit lait et légèrement pressé la pâte.

Le fromage n’a pas été cuit, le lait était bien cru et entier. Il a fallu plus de 200 litres pour obtenir une cinquantaine de reblochons. Reste à les retourner trois fois dans la journée, puis à les saler et à les pré-affiner pendant une petite semaine en les retournant tous les jours, avant de les mettre en cave, toujours à la ferme. Deux semaines d’affinage sur des planchettes de bois, durant lesquelles les fromages sont lavés tous les jours : le temps nécessaire pour développer leurs arômes.

Bon à savoir !

Le reblochon fermier est entièrement fabriqué et affiné à la ferme avec le lait du troupeau. Il arbore une pastille verte, tandis que le reblochon fabriqué en fruitière arbore une pastille rouge. Une production fermière et bio garantit un travail artisanal et un lait non standardisé : chaque fromage est unique.

Comment l’apprécier ?

Version hiver

Nombreuses sont les spécialités savoyardes qui font appel à un bon reblochon qui gratine et fond !
– La tartiflette bien sûr, parfois détournée en croziflette (avec des crozets au lieu des pommes de terre) dont vous trouverez même une version végétarienne sur satoriz.fr.
– Mais aussi la reblochonnade – une raclette au reblochon – ou bien un simple gratin de pâtes.
– Sans oublier le reblochon dans la soupe, avec la croûte bien sûr !

Version été

– Pourquoi ne pas le déguster au couteau accompagné d’une bon cru local ? Avec la croûte, là encore !
– On ajoute de fines tranches ou de petits cubes de reblochon dans un carpaccio de légumes ou une salade de crudités : fraîcheur assurée.
– On l’incorpore dans des terrines ou des petits farcis à la place de la feta ou de la mozzarella.
– Finement fleuri et à la saveur délicate de noisette, le reblochon mérite d’être joliment apprêté. Dans un risotto, une tarte aux légumes, des gougères ou version crème brûlée… Nul doute que les créatifs trouveront matière à s’exprimer !